Cette phrase, que j'ai entendue ou lue à diverses reprises,
me laisse perplexe. En effet, elle est souvent prononcée de manière désabusée,
ce qui sous-entend que non-seulement il n'y a pas une catégorie de terroriste
islamiste, mais qu'en plus les efforts de classification de ces derniers ne
donnent actuellement rien. Au pire, on a plus qu'à attendre 2 à 5 ans pour
avoir une théorie sérieuse ... comme si le temps ne nous était pas compté.
Mon avis est
plutôt que cette affirmation dénote plusieurs phénomènes néfastes. D'abord,
elle nous montre que des journalistes ou des intellectuels, très touchés par
l'horreur du phénomène, laissent leurs émotions obscurcir leur jugement.
Ensuite, cette fameuse phrase nous indique qu'une fois de plus, les chercheurs
ou les théoriciens des sciences humaines ont du mal à gérer la complexité et
qu'ils adoptent une attitude prudentiste face aux grands modèles, face aux grandes typologies. Pourtant, cette question
de la complexité n'est pas nouvelle, même si elle touchait auparavant d'autres
domaines que le terrorisme (exemple : L'Histoire
en miettes de François Dosse, La
Méthode de Edgar Morin, ...). Encore une fois, je me permets déclarer que
tout modèle de sciences humaines a ses limites, ses nuances, ainsi qu'une ou
des exceptions.
Voyons maintenant
qu'elle essai de classification des terroristes nous pourrions établir, bien
que j'avoue n'avoir pas lu le dossier de chaque "soldat de Daesh".
Prenons déjà le premier dénominateur commun : ils sont tous radicaux,
ils commettent tous des attentats, soit des actes hyperviolents, aveugles, et
une grande majorité d'entre-deux sont
des kamikazes, des suicidaires. Ensuite, même si ces hommes cherchent à
brouiller les pistes, ils ont tous subit d'une manière ou d'une autre un
"lavage de cerveau". Ils veulent aussi à tous prix attirer l'attention
du public.
Selon moi, vient un deuxième dénominateur commun : le rejet de leur vie
"terrestre" en France. Effectivement, si beaucoup de ces hommes sont
des djihadistes qui veulent partir en Syrie, c'est bien qu'ils pensent n'avoir
plus rien à attendre de la France. De plus, s'ils se donnent la mort pour
obtenir une vie meilleure dans l'Au-delà, on est obligé de conclure que nos
kamikazes sont insatisfaits de leur vie quotidienne. Et de
"insatisfait" à "frustré" ou "malheureux", il n'y
a qu'un pas, que cette frustration soit matérielle (comme la pauvreté) ou
psychologique (exemples : l'humiliation, la violence symbolique, ...). Dans un monde, où les inégalités sont en
hausse, où beaucoup d'individus manquent d'estime de soi et où les humiliations
sont souvent plus nombreuses que les actes de reconnaissance sociale, ce genre de
dérives n'est pas surprenant. Enfin, si ces terroristes sont capables de tuer
n'importe quel français, homme, femme, vieillard, enfant, personne handicapée
et même les autres musulmans, ils sont forcément en rupture avec la Société
française et ses idéaux. Or, je ne pense pas qu'un lavage de cerveau arrive
seul à provoquer un tel niveau de rupture sociale chez les futurs kamikazes. Il
y a sûrement un "terreau favorable préexistant". Donc, mon avis (qui
n'engage que moi) est que tous ces terroristes sont clairement insatisfaits de
leur existence, qu'ils en tiennent la Société responsable et que l'action
terroriste va donner un sens à leur vie ou leur fournir une vie dans l'Au-delà
qui ne peut être que meilleure. Néanmoins, derrière ces deux dénominateurs
communs, il y a évidemment des divergences, d'où le schéma suivant (voir page
suivante) :
Alors quels pourraient-être ces différents "types"
ou "profils" ? Je n'ai pas poussé plus loin mes recherches, mais
voici une liste de critères que je propose d'utiliser pour différencier les
"soldats de Daesh" :
1° L'âge du terroriste
et notamment s'il est dans la tranche 15-25 ans.
2° Si le terroriste
s'est rendue en Syrie, si il a essayé de rejoindre ce pays ou non.
3° La situation socioprofessionnelle de la cible et son
niveau de qualification.
4° La situation familiale de l'agresseur islamiste
5° La situation pénale du terroriste, notamment : a-t-il déjà
fait de la prison ?
6° Le niveau de connaissance réel de l'islam, durant sa
jeunesse, puis tout au long de sa vie.
7° La situation administrative et migratoire, notamment : le
terroriste est-il issu de la deuxième génération d'immigrés ?
Avec ces informations, on devrait logiquement arriver non
seulement à des dénominateurs communs, mais aussi à des catégories plus utiles aux
autorités, car moins théoriques. Peut-être peut-on se risquer à citer quelques
idées de profils, mais il s'agit-là d'une simple supposition et non pas d'une
affirmation ou d'une démonstration : le jeune adulte potentiellement très
proche des TIC (web, réseaux sociaux, jeux vidéos très violents),
l'intellectuel idéaliste, l'ancien criminel, le frustré accablé par ses échecs,
.... Tout en prenant en compte qu'un individu peut parfois cumuler plusieurs
profils ou passer de l'un à l'autre en quelques années.
Enfin, dernière information en lien avec tout ceci : ce n'est
pas nouveau d'affirmer que les "insatisfaits" rejoignent plus
facilement que les autres des mouvements extrémistes. Parmi les fidèles
d'Hitler, on trouve Goering, un ancien as de l'aviation tombé dans l'alcoolisme
durant l'Entre-deux-guerres et Goebbels, un écrivain sans succès ...
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