mercredi 22 avril 2015

Lutte contre le Terrorisme : pour une stratégie de communication type "Ne laissons pas la peur nous envahir"".

L'émotion et le choc ont été très présents, lors du traitement par les médias des récents attentats qui ont frappé la France. Ce désarroi a aussi touché nos dirigeants et la classe politique, qui se sont empressés de déclarer qu'ils allaient tout faire pour empêcher que cela se reproduise. Leurs discours sont très endeuillés ou du type "martial".  Mais ces postures et ce genre de messages sont-ils vraiment efficaces, viables et constructifs ?
     Cette attitude moralement justifiée me semble peu pertinente pour plusieurs raisons. C'est une évidence que la France a subi et va encore subir  d'autres attentats terroristes. Plusieurs chercheurs ont montré que le terrorisme n'est pas née en 2001. En effet, l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand en juin 1914 peut-être considéré comme un acte terroriste. Le terrorisme a plutôt changé son visage et ses méthodes. Par conséquent, pourquoi un phénomène vieux de plus d'un siècle disparaitrait-il ? De plus, la mondialisation et Internet étant des phénomènes peu contrôlables par notre gouvernement, comment notre Président pourrait-il nous garantir une parfaite sécurité ? Sachant que notre arme nucléaire n'a aucun effet dissuasif sur les terroristes, qu'il y aura toujours des exclus facilement manipulables et qu'il y aura toujours des kalachnikov en circulation, il est évident qu'on ne peut pas interdire et empêcher totalement le terrorisme. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a rien à faire (ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit). On peut booster nos agences de renseignement, améliorer la coopération internationale, mieux gérer nos données, bombarder des camps d'entrainement, affaiblir Daesh en livrant des armes aux Kurdes, infiltrer des taupes au sein des réseaux terroristes, surveiller nos gares et nos aéroports, ..... Cependant, on ne pourra jamais supprimer définitivement la menace terroriste. Donc, autant ne pas dire aux français que les attentats sont des phénomènes rares et exceptionnels et que le gouvernement va tout faire pour mettre un terme définitif à tout ceci.
      Mais quel discours tenir, alors ? Déjà, reprenons des outils intellectuels pertinents. Le théoricien Clausewitz nous apprend que la guerre est, avant d'être une passe d'armes, une épreuve de volonté. Le stratège Gérard Chaliand nous apprend qu'un acte terroriste est une action violente, dont les effets psychologiques sont nettement plus importants que les pertes/ les destructions réelles. Enfin, le mot "terrorisme" vient de terreur, "terror" en anglais, qui signifie "répandre la peur par la violence". La peur, voilà la véritable arme des terroristes. Par conséquent, je propose simplement de communiquer de manière moins affective, en montrant que ces attentats sont illégaux et néfastes, mais qu'ils ne nous font pas trembler. Que nous sommes prêts à y faire face, car cette menace est identifiée. Nombreux sont ceux parmi vous qui savent qu'en cas de conflit avec une personne, il ne faut pas montrer à celle-ci que chacune de ses bassesses nous touche, de manière à apparaître plus fort. Voilà, donc l'attitude qu'il faudrait selon moi adopter : pleurer nos morts pendant une courte période, ne pas sous-estimer le terrorisme, en disant qu'on peut l'abattre, mais ne pas non plus le surestimer, en le décrivant comme invisible, invincible et imprévisible. Fin 1940, Hitler décida de bombarder les villes anglaises avec sa luftwaffe pour remporter la bataille d'Angleterre. Il pensait terroriser les anglais, affaiblir leur moral et les contraindre à négocier. Les anglais se sont résignés, tout en poursuivant courageusement la lutte, en attaquant les bombardiers ennemis avec leurs chasseurs Spitfire. Finalement, Londres a gagné la bataille, puis la guerre et Berlin perdit bien plus d'avions militaires dans cette affaire que la couronne britannique. Enfin, si on pouvait stopper et faire disparaître le terrorisme, je crois qu'Israël y serait arrivé  déjà arrivé depuis plusieurs années....
     Par conséquent, le Terrorisme est un phénomène grave, redoutable et menaçant. Mais la meilleure posture à adopter n'est pas de le nier ou de l'amplifier en le déclarant "Ennemi Public n°1", "Grande Menace du XXIe siècle". Le terrorisme a toujours existé et il sera toujours présent à l'avenir. Cela ne sert à rien d'annoncer que tout sera mis en œuvre pour détruire ce danger, car la nature même de cette menace la rend extrêmement dure à annihiler (oui, traquer et arrêter des individus manipulables et isolés, qui se cachent derrière des pseudos sur le web, et qui peuvent acheter des mitraillettes à seulement quelques centaines d'euros, ce n'est pas facile). Donc, autant ne pas faire une promesse qu'on ne pourra pas tenir. Autant montrer à ceux qui veulent nous faire peur pour nous affaiblir, que nous ne sommes pas effrayés, que nous connaissons bien cette menace, que celle-ci ne nous atteint "pas tant que ça". Je sais que nos médias, pour qui la peur est un argument d'audience, ne seront sans doute pas favorable à ce changement de direction. Mais notre gouvernement doit pouvoir impulser une autre orientation, en termes de communication, sans porter atteinte à la liberté de la Presse. Il ne s'agit pas d'accepter le terrorisme, mais de partir du fait qu'il ne disparaitra pas, ou en tous cas, très difficilement.

En gros, plutôt que de déclarer : "Ces attentats sont une monstruosité; on va traquer sans relâche les coupables pour les châtier", je pense qu'il serait préférable de dire : " Nous savons que nous pouvons être la victime d'attentats terroristes violents qui nous feront mal, mais nous rendrons les coups ". 

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