mardi 27 août 2013

Proposition de schéma sémiotique d'analyse des discours politiques [Schéma]

Récemment, j'ai lu un article de la revue Sciences Humaines évoquant le "Carré sémiotique des discours politiques", c'est-à-dire un schéma permettant d'analyser et de comprendre ces derniers.
   Ce schéma regroupe quatre valeur essentielles que l'on retrouve régulièrement et qui s'opposent ou se complètent. Cette figure géométrique est inspirée du fameux carré logique d'Aristote. Les 4 valeurs retenues sont les suivantes :
- Le "vécu partagé" : c'est-à-dire le sens du collectif, de la communauté, du "Nous, ensembles".
- L' "utopie visée" : correspond à "ce que notre communauté peut devenir", ce à quoi elle pourrait ressembler.
- La "réalité analysée" : c'est une vision concrète, rationnelle, objective du monde réel.
- La "fiction imaginée" : c'est un regard déformé, interprété, idéalisé de la réalité.

Le vécu partagé s'oppose à l'utopie visée, et la réalité analysée est contraire à la fiction imaginée. La fiction est en contradiction avec le vécu; l'utopie l'est aussi avec la réalité. Voici ce que donne concrètement ce carré sémiotique :
Du coup, il est intéressant de voir quelle(s) valeur(s) le politicien mobilise(nt) le plus ou quel parcours il emprunte pour passer de l'une à l'autre. Ainsi, Nicolas Sarkozy a mobilisé beaucoup la réalité analysée et le vécu partagé lors de la campagne présidentielle de 2007, mais il s'est peu attardé sur l'utopie. L'ancien président voulait rester proche de la réalité et proposer des solutions concrètes. Par contre, à l'inverse, Ségolène Royale était plus idéaliste et elle souhaitait que son utopie soit partagée par tous, puis qu'elle soit réalisée. Voici ce que donne son parcours :
L'article de Sciences Humaines mentionnent aussi les discours de François Bayrou et ceux de Jean-Marie Le Pen. Ce dernier part de la réalité analysée, mais bascule rapidement vers la fiction imaginée, pour enfin finir sur une utopie, celle d'une France plus forte et plus patriote.

A partir de cet exemple, j'ai voulu élargir ce carré sémiotique à une figure plus complexe, prenant en compte plus de valeurs. Je propose donc un carré supplémentaire intégrant 4 autres valeurs :
- La liberté et les droits
- L'égalité
- La tolérance
- La contrainte et l'ordre.

Dans mon raisonnement, la liberté s'oppose à l'égalité. En effet, ces deux valeurs sont rarement compatibles, comme Tocqueville l'a bien démontré. Par exemple, pour obtenir plus d'égalité, un Etat peut être amené à taxer une catégorie sociale (abaissement de liberté pour elle) pour redonner les sommes prises à une autre partie de la population (meilleure égalité, au final). La tolérance est logiquement contraire à la contrainte. Voici ce que cela donne :
Et voici ce que donne, sur ce schéma, un discours qui serait de ce type :
"Un homme doit être libre de se promener dans la rue sans risquer pour sa vie, sans avoir peur. Encore la semaine dernière, l'affaire X a défrayé la chronique pour son horreur sans pareil. Une petite-fille violée et mutilée de cette manière voit sa vie brisée. Je propose donc d'être plus ferme et de créer de nouvelles sanctions face aux pédophiles de ce genre, pour lutter contre ce fléau"
Je pense donc que ma proposition de schéma analytique peut être pertinente et intéressante. On pourrait bien sûr compléter ce schéma par d'autres carrés qui s'empilent et se complètent.

Sources :

BERTRAND D, DEZE A, MISSIKA J-L, Le carré sémiotique des discours politiques, dans SCIENCES HUMAINES n°209 de novembre 2009.

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