dimanche 28 mai 2017

Deux stratégies d'espionnage : le petit ou le grand réseau ? (schémas)





Des exemples historiques me permettent de clarifier facilement ces deux approches, que les professionnels doivent probablement appeler autrement.
    Vu le nombre élevé d'agents impliqués, le réseau soviétique constitué pour voler les secrets de la bombe A aux américains relève d'une  stratégie du grand réseau. En effet, les communistes ont recruté les physiciens Klaus Fuchs, Théodore Hall et Alan Nunn-May, sachant que l'ingénieur Julius Rosenberg, à priori recruté par Alexandre Feklissov, a impliqué sa propre femme Ethel, ainsi que son beau-frère machiniste : David Greenglass, .... Et dans cette liste, je ne prends pas en compte les taupes jamais découvertes, les simples agents de liaison et autres officiers traitants. L'urgence pour les russes d'obtenir les secrets de la bombe et d'ainsi combler leur retard explique l'utilisation de très nombreux espions.
Concernant la stratégie du petit réseau, quelques citations valent mieux qu'une longue explication : "Mais c'est tout simplement parce que l'espionnage cubain compte parmi les meilleurs du monde ! Les cubains sont experts dans l'art de recruter des agents doubles. Plus récemment, en 2001, nous avons découvert qu'Ana Belen Montes s'était hissé au sommet de l'espionnage américain. Analyste senior à la DIA, elle y dirigeait le dossier cubain" (propos de Brian Atell, recueillis par le journaliste Axel Gylden pour l'Express en 2012). Autre référence : "La patience est un des principaux mérites des services castristes. Ceux-ci sont disposés à attendre plusieurs années, voire des décennies, jusqu'à ce que leurs agents atteignent des positions stratégiques chez l'ennemi. Tel était le cas de Kendall Myers qui, en sus de son accès permanent à des document secrets, était en contact quotidien avec des analystes de la CIA." (Axel Gylden , l'Express, 6 août 2009 et 25 avril 2012). Nous voyons donc à travers ces remarques que la DGI cubaine s'était fixée pour priorité de recruter des taupes au sommet du système adverse (Pentagone, CIA, DIA, ...). Il s'agissait d'une démarche de longue haleine qui s'oppose à l'idée de recruter rapidement et massivement de nombreux agents. Là, les officiers de la Havane ont une approche plus qualitative que quantitative. Contrairement au cas soviétique, ils ont du temps devant eux, donc ils peuvent se permettre de "placer leurs pions" ou de recruter le "parfait espion".
   Au final, ces deux approches ont chacune leurs avantages et leurs défauts : le petit réseau demande du temps pour  être mis en place, mais il est très rentable à long terme, alors que la stratégie du grand réseau est efficace à court terme, mais elle est tellement peu discrète, qu'elle ne peut qu'entraîner une vive réaction des services de contre-espionnage adverses. Une combinaison de ces deux démarches doit être logiquement possible, à condition de séparer, de bien cloisonner, le groupe chargé de recruter beaucoup d'agents, de la cellule qui doit trouver des taupes haut placées.


SOURCES :

BROUSSARD P. et PONTAUT JM., Les grandes affaires d'espionnage. Guerre froide, chute du mur, secret d'Etat, terrorisme, l'EXPRESS, Paris, 2012.
KAUFFER Rémi, Histoire mondiale des services secrets, Perrin, Paris, 2015.
HISTORIA HS N°23 : Histoire de l'espionnage. 1945-1971, Tallandier, 1971.
https://en.wikipedia.org/wiki/Clandestine_cell_system


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